ALCESTIS de Katharine
BEUTNER
Ed Soho
Pages : 246
Version originale : anglais
Format livre numérique
Genre : fantasy
Dans la mythologie grecque, Alcestis ou Alceste est la fille du roi Pélias. Son mariage avec le roi Admète fut un peu compliqué par pas mal d'embrouilles avec les divinités (mais ça dans la mythologie grecque c'est pas nouveau, c'est même le pain quotidien des mortels). Son époux ayant reçu la faveur d’Apollon qu'il pourrait éviter la mort si quelqu'un prenait de son plein gré sa place dans le royaume d'Hadès, et personne ne s'étant dévoué, c'est sa femme à qui il n'avait rien été demandé qui se dévoua. Elle fut ramené chez les vivants au bout de trois jours par Hadès ou Perséphone impressionnés par son sacrifice. Selon certaines variantes c'est Héraclès qui vient la chercher pour la ramener à son époux. Les deux tourtereaux auront deux enfants et une longue vie paisible.
Image idéale de l'épouse dévouée jusqu'au sacrifice ultime à son mari, on ne sait finalement rien d'Alcestis ni de ce qu'elle a vécu pendant ces trois jours dans le monde des morts. Elle n'a jamais donné son point de vue sur son histoire gardant son secret. Mais n'y a t-il pas d'autres raisons que l'amour pour son mari pour expliquer son geste ?
Ce roman comble le vide laissée par le silence d'Alcestis. Voici donc le récit mythologique raconté de son point de vue puisqu'elle devient narratrice. Le livre se scinde en deux parties distinctes. La première, où elle raconte son enfance, son entrée dans l'âge de se marier et le moment où elle choisit d'accompagner Hermès dans le monde des morts à la place d'Admetus. La seconde partie raconte son odyssée dans l'au-delà, ce qui lui est arrivée durant ces trois jours ainsi que son retour à la vie.
Le récit se basant sur la mythologie, il en respecte le principe : les dieux sont réels et interviennent dans le monde des mortels, des personnages tels que Tiresias, Heraclès, Créon sont eux aussi bien là. Tout le contexte mythologique a été gardé par l'auteur qui ne se lance pas dans des digressions didactiques pour expliquer qui est qui, un procédé qui a tendance à couper le rythme du récit et force le lecteur à quitter l'ambiance et le charme de l'histoire. Et cerise sur le gâteau et là je me suis vraiment régaler, elle reprend tels quelles les descriptions que l'on retrouve dans l'Odyssée sur le royaume d'Hadès tel que se l'imaginaient les grecs. La mort pour les grecs de l'antiquité, c'est pas un truc super joyeux. Les morts ne sont plus que des ombres errantes, pathétiques sans mémoire et vide de toute vitalité ou d'émotion, autant dire que ce n'est pas super glamour et que ça ne fait pas super envie.
Cela dit, cela ne l'empêche pas de broder sur ce canevas, ses propres interprétations notamment sur les relations que le couple Hadès/Perséphone entretiennent en mettant surtout l'accent sur celle-ci puisque toute l'histoire repose sur la relation amoureuse qui se tisse entre elle et Alcestis. Au milieu de cette uniformité grise et désespérante qu'est l'au-delà, Alcestis tout en cherchant désespérément sa petite soeur décédée il y a de nombreuses années, et explorant les recoins de cet autre monde, vit une vraie passion amoureuse et vouée à se finir par une séparation douloureuse.
Un roman marquant qui aura réussi à émouvoir mon petit coeur en caramel tout mou, j'ai même versé ma petite larme d'émotion, les dernières lignes étant de toute beauté. J'ai aimé, que l'auteur ait préféré nous plonger dans l'intimité du personnage et raconter une histoire plutôt que de faire un cours de mythologie et de civilisation hellenistique. C'est une voix, un personnage humain qui s'exprime et non une vague figure antique sans état d'âme. Un récit qui continue à vous accompagner une fois la dernière ligne lue, c'est rare.